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L’expertise CE : un outil pour défendre l’emploi et les salaires

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L’expertise CE : un outil pour défendre l’emploi et les salaires Empty L’expertise CE : un outil pour défendre l’emploi et les salaires

Message  gdbabou Sam 21 Fév - 13:49

L’affichage économique de l’entreprise est formulé par la direction financière selon le point de vue des actionnaires. Les salariés ayant des intérêts distincts, il est donc nécessaire qu’ils puissent développer une perspective critique sur ce qui leur est présenté. L’expert du CE intervient dans cette optique. Son objectif : aider le comité d’entreprise et les élus à analyser les comptes et la stratégie de l’entreprise, en vue d’une défense de l’emploi et des salaires.
Le comité d’entreprise a pour objectif d’assurer l’expression collective des salariés, pour qu’ainsi leurs intérêts soient pris en compte dans l’ensemble des décisions stratégiques et financières de l’entreprise. Pour exercer pleinement cette prérogative, le CE peut se faire assister d’un expert-comptable de son choix (Code du travail, art. L. 2325-35) dans un certain nombre de missions allant de l’examen annuel des comptes à la procédure de consultation en cas de plan de sauvegarde de l’emploi. Hormis la mission d’analyse des orientations stratégiques financée à hauteur de 20 % par le CE, ces missions légales sont aux frais de l’employeur, ce qui permet à l’ensemble des CE, quels que soient leurs moyens, de pouvoir être assistés.

Ce recours à un expert, et la large palette d’intervention qu’il permet, sont parfois ignorés par certains CE qui imaginent que l’intervention potentielle d’un expert sera une simple reformulation des présentations que les directeurs financiers de l’entreprise peuvent leur faire. Pourtant, l’importante jurisprudence concernant le rôle et les droits de l’expert lui permet d’accéder aux mêmes documents que le Commissaire aux comptes et d’en tirer un grand nombre d’analyses pouvant servir utilement les revendications des élus. L’expert peut également déceler des erreurs, volontaires ou non, des directions dans les calculs de la participation, de l’intéressement ou des budgets du CE.

Ce droit pour les CE date de la loi du 16 mai 1946 qui a accordé aux comités d’entreprise l’assistance d’un expert-comptable et la communication des documents remis aux actionnaires. Les multiples avancées de cette loi (réduction du seuil d’effectifs de 100 à 50 salariés ; création du droit de consultation et non plus seulement d’information sur l’organisation et la marche générale de l’entreprise, etc.) ont permis de concrétiser en partie, et contre l’avis du patronat, l’une des idées du programme du Conseil national de la résistance, qui souhaitait que les salariés participent à la direction de l’économie.

Le rôle de l’expert a par la suite été étendu par les lois Auroux du 28 octobre 1982. Sa mission n’est depuis cette date plus limitée à une analyse comptable: elle est étendue à l’appréciation de la situation économique, financière et sociale de l’entreprise. La jurisprudence précise que l’expert du CE est seul juge des pièces qui lui sont nécessaires pour l’exercice de ses fonctions et que le chef d’entreprise est obligé de les lui communiquer.

L’expert n’a pas qu’un rôle pédagogique

L’accès à l’information permis par la loi n’est pas uniquement là pour que ces informations soient rendues intelligibles par l’intermédiaire de l’expert et ainsi comprises par tous les élus. L’expert a certes un rôle pédagogique, d’explications des comptes de l’entreprise aux représentants des salariés, mais sa mission ne s’arrête pas à cela. L’expert doit utiliser l’ensemble des informations transmises par la direction pour y déceler ce qui peut soutenir les argumentations et les revendications des représentants des salariés. Il ne doit pas se contenter d’une analyse comptable, mais doit également analyser la stratégie de l’entreprise et les interrogations qu’elle suggère. La possibilité d’avoir accès à l’ensemble des données sociales (fichier du personnel, DADS, tableaux d’entrées-sorties, etc.) lui permet par exemple d’étudier concrètement l’impact de la stratégie de l’entreprise sur les rémunérations des salariés, d’analyser si le principe d’égalité de traitement est respecté par l’employeur ou encore de s’assurer que la convention collective de l’entreprise est bien appliquée.

De nombreuses directions manient habilement le double discours. Tandis que les actionnaires vont être inondés de propos triomphant, les représentants des salariés vont quant à eux subir des analyses alarmistes et fatalistes justifiant la prétendue impossibilité d’augmenter les salaires et l’emploi. L’expert est donc là pour donner un autre éclairage aux chiffres, pris sous l’angle des intérêts des salariés. Les intérêts des salariés et des actionnaires sont distincts. Il faut donc que les CE soient suffisamment armés pour crédibiliser leurs revendications par l’argumentation et ne pas se laisser enfermer par les discours patronaux.

Perte comptable ne veut pas forcément dire difficulté financière

Lorsqu’une entreprise est en perte comptable, il est facile pour l’employeur de tirer prétexte de cette situation économique pour refuser les augmentations de salaire voire diminuer l’emploi.

Or, d’une part, l’expert peut démontrer, quand c’est le cas, que la perte comptable d’un exercice ne pose pas de difficulté particulière immédiate, et que la situation financière de l’entreprise permet tout à fait de dégager les marges de manœuvre suffisantes pour favoriser l’emploi.

En analysant la situation financière de l’entreprise, sur laquelle les directions s’étendent rarement, et qui peut être plus complexe à appréhender pour les élus, l’expert peut aider le CE à contre-argumenter face à la direction. En effet, une perte comptable peut tout à fait être soutenable si la situation financière de l’entreprise le permet transitoirement. Une entreprise en perte peut avoir parfois tout intérêt à poursuivre les recrutements et les investissements pour rebondir plutôt que de couper dans les dépenses et n’avoir ainsi plus aucune chance de retrouver la croissance de son chiffre d’affaires.

Par ailleurs, la perte comptable peut résulter d’ une construction, en particulier dans les grands groupes multinationaux qui vont parfois utiliser des mécanismes comptables visant à vider les bénéfices de leurs filiales françaises pour les transférer dans les filiales situées dans des pays où l’impôt sur les sociétés est plus faible. Les groupes multinationaux peuvent par exemple utiliser le mécanisme des prix de transfert qui permet de surfacturer aux filiales françaises des services ou des marchandises que leur vendent les filiales étrangères. Ces transferts représentent aujourd’hui un volume très important. On estime qu’un tiers des échanges de la France correspond à un commerce entre filiales d’un même groupe. Par exemple, plus de la moitié du déficit commercial de la France vis-à-vis de l’Allemagne est due à une manipulation des prix de transferts.

L’expert peut analyser ces transferts qui viennent dégrader fictivement les comptes de l’entreprise qu’il analyse. Il peut, plus globalement, analyser l’ensemble des managements fees, c’est-à-dire des redevances que la filiale reverse à la holding en échange de prestations administratives, du loyer, etc.

Sans ce travail d’expert, les élus du CE restent prisonniers de l’affichage économique voulu par la direction financière, soumise aux ordres et aux intérêts des actionnaires, et qui n’a donc pas intérêt à dévoiler la stratégie qui sous-tend son compte de résultat.

Une baisse du bénéfice : la faute aux salaires ?

Mais même lorsque l’entreprise n’est pas en perte comptable, beaucoup de directions bloquent les salaires et l’emploi. Par exemple, lorsque le bénéfice d’un exercice a baissé par rapport à l’année précédente, certaines directions vont se servir de ce fléchissement pour refuser d’octroyer des augmentations de salaire lors des Négociations Annuelles Obligatoires. L’expert du CE peut alors démontrer que la baisse du bénéfice n’a rien à voir avec les frais de personnel, mais est liée par exemple à des charges financières. Le discours patronal dominant a tendance à toujours voir la cause des difficultés chez les salariés, alors que ce sont ces derniers qui créent la valeur, et qu’une diminution du bénéfice est le plus souvent liée à des charges sans rapport avec la masse salariale.

Par ailleurs, lorsque le bénéfice augmente et que les frais de personnel progressent également, l’employeur aura souvent tendance à prétendre que les salariés ont donc été intéressés à cette croissance de la profitabilité. L’expert peut là encore démontrer que ce n’est pas le cas, en analysant les frais de personnel en proportion de la valeur ajoutée de l’entreprise. On observe souvent qu’ils progressent moins vite que la profitabilité dégagée et que d’importants gains de productivité ont été demandés aux salariés sans hausse proportionnelle de leur rémunération. La rémunération du capital augmente souvent plus fortement que celle des salaires, et l’expert peut le démontrer en détaillant notamment le partage de la valeur ajoutée.

En analysant le coût du capital, il peut identifier :
•le « vrai » coût du capital, qui correspond au financement des investissements nécessaires à la fabrication et à l’acquisition des moyens de production (usines, brevets, logiciels, machine, etc.) ;
•le surcoût du capital, c’est-à-dire le coût financier (dividendes et intérêts) prélevé sur les revenus de l’entreprise, qui ne correspond à aucun service économique rendu, et qui constitue une rente pour les actionnaires.

Des actionnaires subventionnés par l’Etat

De nombreuses entreprises bénéficient des aides de l’Etat à travers les exonérations de cotisations sociales, les niches fiscales et des mécanismes de crédit d’impôt comme le CIR (Crédit impôt recherche) et le CICE (Crédit impôt compétitivité emploi). L’expert peut faire l’état des lieux de ces subventions de l’État qui sont parfois directement versées en dividendes.

Par exemple, le CICE doit, selon le législateur, être utilisé par les entreprises pour le financement de l’amélioration de leur « compétitivité ». Il n’est pas censé financer une hausse des bénéfices distribués ni une augmentation des rémunérations des personnes exerçant des fonctions de direction. Mais aucune sanction n’est prévue si c’est le cas. Et depuis qu’il a été mis en place en 2013, de nombreuses entreprises en ont, de fait, versé une partie à leurs actionnaires. L’expertise CE peut permettre de démontrer que les crédits d’impôt ont été mal utilisés à travers l’analyse des comptes et des rémunérations. L’expert peut aider le CE à rédiger un rapport qui sera remonté au comité national de suivi du CICE. Le CE pourra se servir de cette analyse pour demander à la direction de l’utiliser pour les salaires et l’emploi.

L’expert doit travailler en lien direct avec l’avocat du CE

L’avocat-conseil du comité joue un rôle primordial dans la mise en œuvre de l’expertise et des prérogatives économiques :
•toute expertise suppose au préalable la détermination du cadre juridique et le contrôle du respect de la légalité de l’opération expertisée ;
•l’expertise, à l’origine purement comptable est devenue au fil du temps également économique, financière, juridique et sociale ;
•l’argumentaire construit par l’expert-comptable au profit du comité nécessite l’intervention de l’avocat pour peser sur les décisions de l’employeur et :
•voter les délibérations et rendre les avis adaptés en fonction des conclusions de l’avocat et de l’expert-comptable ;
•débattre et négocier utilement avec la direction en s’appuyant sur les arguments juridiques et économiques définis avec l’avocat et l’expert ;
•le cas échéant, agir en justice.

Pour être pleinement utile aux revendications des représentants des salariés, l’expert du CE doit donc travailler en lien direct avec l’avocat du CE, et leurs travaux être guidés par une stratégie commune. L’avocat peut conseiller utilement les élus, dès la rédaction de la lettre de mission, en particulier en ce qui concerne les questions de rémunération, de périmètre de l’entreprise et de lien avec son groupe d’appartenance et du respect du statut collectif. Le travail commun est une nécessité absolue en cas de plan de sauvegarde de l’emploi.

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