Réduction des effectifs dans les entreprises : quel impact psychologique sur les salariés touchés ?
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Réduction des effectifs dans les entreprises : quel impact psychologique sur les salariés touchés ?
L’actualité apporte son lot régulier de réduction des effectifs dans les grands groupes. Que nous apprennent les sciences humaines sur l’impact psychologique des plans de sauvegarde de l’emploi et des plans de départ volontaire sur les salariés touchés ? Comment y faire face ?
La croyance en un monde juste : le besoin de croire en un univers ordonné
La croyance en un monde juste est un biais de décodage de la réalité très répandu. Pour le psychologue social Melvin J. Lerner, les individus ont besoin de se représenter le monde comme un univers ordonné et stable.
Personne n’est prêt à accepter l’idée que le monde est complètement chaotique et sans repères. Cela supposerait d’être livré en permanence à l’arbitraire, aux injustices et à l’angoisse qui en découlerait. Nous avons besoin de penser que le monde est harmonieux, que les choses ont un sens pour être en mesure de nous adapter et d’exercer un contrôle sur notre environnement par nos actions. C’est ce postulat qui nous pousse à nous confronter au monde et à mobiliser notre énergie dans la poursuite de buts à long terme. A quoi bon faire des efforts si l’on ne peut en tirer des bénéfices ? Pourquoi devrait-on bien se comporter si les mauvaises actions ne sont pas punies ? La croyance en un monde juste a donc une forte valeur fonctionnelle pour les personnes et pour l’ordre social.
Ces certitudes peuvent être ébranlées par l’annonce de la perte ou du changement non désiré de son emploi. Ces situations génèrent d’autant plus de détresse que les personnes sont déjà fragilisées (situation financière ou familiale précaire, autre problème relatif au travail, vulnérabilité psychologique, etc.).
Quels effets peut-on observer chez les salariés impactés ?
Les personnes impactées par un changement tel qu’un licenciement peuvent se replier sur elles-mêmes, être moins motivées ou au contraire se jeter dans le travail. Pour certaines, ce sont des difficultés à se concentrer. L’angoisse et le stress peuvent aussi avoir des répercussions physiologiques :
altération du sommeil ;
tension musculaire et douleurs ;
maux de tête ;
maux digestifs.
Chez d’autres, l’annonce de la perte prochaine ou du changement non désiré de son emploi peut aussi avoir un retentissement émotionnel :
humeur triste, irritable ou changeante ;
anxiété, sentiment de pression ;
apathie, envie de rien.
Avec la vision du monde, la vision de soi est remise en cause. Bernard Rimé, docteur en psychologie à l’université de Louvain, explique : « la théorie tout entière bascule, l’individu fait l’expérience d’un monde qui s’effondre, et cette expérience suscite une angoisse extrême ». Le déni est une des stratégies que les individus peuvent mettre en place pour se protéger. Pour Rimé, le déni est une phase normale, qui permet « d’accorder un délai supplémentaire pour mener à bien la révision de ses modèles de la réalité ». Selon les personnes et le contexte, c’est un processus qui peut prendre plus ou moins de temps.
Que faire pour soi ?
Partager avec l’autre
Pour Rimé, partager ce moment de notre vie est une stratégie naturelle pour gérer l’exposition à une situation émotionnellement intense et menaçante. C’est le partage social des émotions. Il a des bénéfices symboliques et subjectifs forts :
verbaliser les émotions permet d’obtenir du soutien : être entouré, resserrer ses liens affectifs et sociaux ;
verbaliser ses émotions consolide l’évènement dans la mémoire, pour mieux lier son expérience présente à son passé et à son futur ;
le partage social des émotions alimente le savoir-faire collectif sur la gestion des situations émotionnelles de crise.
Si le fait de partager ne permet pas de régler toutes les difficultés, cela permet de retrouver du sens petit à petit. Les effets bénéfiques sont amplifiés lorsque l’interlocuteur est bienveillant, qu’il approuve sans juger, qu’il s’intéresse au vécu de l’autre (« je vois que tu es en colère/triste », « qu’est-ce qui te fais le plus peur ? »). Au contraire, le fait de rationaliser le vécu (« ne t’inquiète pas », « il va falloir te prendre en main ») peut constituer un obstacle à la recherche de sens.
Il peut être constructif d’apprendre à repérer les interlocuteurs qui vous aideront à y voir plus clair pour privilégier ces échanges.
Agir pour soi
Si dans ces circonstances difficiles, on n’a envie de rien, se stimuler peut avoir des conséquences bénéfiques. Plutôt que de se focaliser sur son problème immédiat, on peut se tourner à l’occasion vers des plaisirs simples et accessibles pour retrouver du sens (cuisiner un plat qu’on aime, appeler un ami, découvrir une activité ou un lieu, passer un moment privilégié avec ses proches par exemple).
Agir pour soi, c’est aussi prendre le temps de se renseigner et de se poser des questions sur son avenir professionnel, tout en acceptant de se sentir parfois perdu. Il ne faut pas hésiter à poser ses réflexions à l’écrit, à l’aide de colonnes :
les perspectives que mes différentes options m’offriraient/les portes qu’elles me fermeraient ;
mes souhaits professionnels et personnels/les compromis que je pourrais ou non accepter.
Ce qu’il faut retenir, c’est que l’annonce de la perte ou du changement non désiré de son emploi peut avoir un réel retentissement psychologique sur l’individu, au-delà de la menace pragmatique et financière. Certains auront besoin de temps et de soutien pour retrouver leur capacité à envisager à nouveau le monde comme ordonné, et ainsi formuler de nouveaux projets qui l’inscriront dans ce monde.
La croyance en un monde juste : le besoin de croire en un univers ordonné
La croyance en un monde juste est un biais de décodage de la réalité très répandu. Pour le psychologue social Melvin J. Lerner, les individus ont besoin de se représenter le monde comme un univers ordonné et stable.
Personne n’est prêt à accepter l’idée que le monde est complètement chaotique et sans repères. Cela supposerait d’être livré en permanence à l’arbitraire, aux injustices et à l’angoisse qui en découlerait. Nous avons besoin de penser que le monde est harmonieux, que les choses ont un sens pour être en mesure de nous adapter et d’exercer un contrôle sur notre environnement par nos actions. C’est ce postulat qui nous pousse à nous confronter au monde et à mobiliser notre énergie dans la poursuite de buts à long terme. A quoi bon faire des efforts si l’on ne peut en tirer des bénéfices ? Pourquoi devrait-on bien se comporter si les mauvaises actions ne sont pas punies ? La croyance en un monde juste a donc une forte valeur fonctionnelle pour les personnes et pour l’ordre social.
Ces certitudes peuvent être ébranlées par l’annonce de la perte ou du changement non désiré de son emploi. Ces situations génèrent d’autant plus de détresse que les personnes sont déjà fragilisées (situation financière ou familiale précaire, autre problème relatif au travail, vulnérabilité psychologique, etc.).
Quels effets peut-on observer chez les salariés impactés ?
Les personnes impactées par un changement tel qu’un licenciement peuvent se replier sur elles-mêmes, être moins motivées ou au contraire se jeter dans le travail. Pour certaines, ce sont des difficultés à se concentrer. L’angoisse et le stress peuvent aussi avoir des répercussions physiologiques :
altération du sommeil ;
tension musculaire et douleurs ;
maux de tête ;
maux digestifs.
Chez d’autres, l’annonce de la perte prochaine ou du changement non désiré de son emploi peut aussi avoir un retentissement émotionnel :
humeur triste, irritable ou changeante ;
anxiété, sentiment de pression ;
apathie, envie de rien.
Avec la vision du monde, la vision de soi est remise en cause. Bernard Rimé, docteur en psychologie à l’université de Louvain, explique : « la théorie tout entière bascule, l’individu fait l’expérience d’un monde qui s’effondre, et cette expérience suscite une angoisse extrême ». Le déni est une des stratégies que les individus peuvent mettre en place pour se protéger. Pour Rimé, le déni est une phase normale, qui permet « d’accorder un délai supplémentaire pour mener à bien la révision de ses modèles de la réalité ». Selon les personnes et le contexte, c’est un processus qui peut prendre plus ou moins de temps.
Que faire pour soi ?
Partager avec l’autre
Pour Rimé, partager ce moment de notre vie est une stratégie naturelle pour gérer l’exposition à une situation émotionnellement intense et menaçante. C’est le partage social des émotions. Il a des bénéfices symboliques et subjectifs forts :
verbaliser les émotions permet d’obtenir du soutien : être entouré, resserrer ses liens affectifs et sociaux ;
verbaliser ses émotions consolide l’évènement dans la mémoire, pour mieux lier son expérience présente à son passé et à son futur ;
le partage social des émotions alimente le savoir-faire collectif sur la gestion des situations émotionnelles de crise.
Si le fait de partager ne permet pas de régler toutes les difficultés, cela permet de retrouver du sens petit à petit. Les effets bénéfiques sont amplifiés lorsque l’interlocuteur est bienveillant, qu’il approuve sans juger, qu’il s’intéresse au vécu de l’autre (« je vois que tu es en colère/triste », « qu’est-ce qui te fais le plus peur ? »). Au contraire, le fait de rationaliser le vécu (« ne t’inquiète pas », « il va falloir te prendre en main ») peut constituer un obstacle à la recherche de sens.
Il peut être constructif d’apprendre à repérer les interlocuteurs qui vous aideront à y voir plus clair pour privilégier ces échanges.
Agir pour soi
Si dans ces circonstances difficiles, on n’a envie de rien, se stimuler peut avoir des conséquences bénéfiques. Plutôt que de se focaliser sur son problème immédiat, on peut se tourner à l’occasion vers des plaisirs simples et accessibles pour retrouver du sens (cuisiner un plat qu’on aime, appeler un ami, découvrir une activité ou un lieu, passer un moment privilégié avec ses proches par exemple).
Agir pour soi, c’est aussi prendre le temps de se renseigner et de se poser des questions sur son avenir professionnel, tout en acceptant de se sentir parfois perdu. Il ne faut pas hésiter à poser ses réflexions à l’écrit, à l’aide de colonnes :
les perspectives que mes différentes options m’offriraient/les portes qu’elles me fermeraient ;
mes souhaits professionnels et personnels/les compromis que je pourrais ou non accepter.
Ce qu’il faut retenir, c’est que l’annonce de la perte ou du changement non désiré de son emploi peut avoir un réel retentissement psychologique sur l’individu, au-delà de la menace pragmatique et financière. Certains auront besoin de temps et de soutien pour retrouver leur capacité à envisager à nouveau le monde comme ordonné, et ainsi formuler de nouveaux projets qui l’inscriront dans ce monde.
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Date d'inscription : 06/09/2012
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